Marc Maouche, candidat de l’AASGO aux élections du Conseil d’administration d’Orange, est allé à la rencontre des salariés lors d’une tournée d’informations publiques à Lyon, Caen, Rennes et Paris durant les premières semaines de janvier. En plus d’une conférence téléphonique programmée le 17 janvier…
Nous vous partageons ici le dialogue très riche qui s’est tenu, en conservant la forme dialoguée des échanges pour vous restituer de la façon la plus fidèle et vivante possible, les questions, les surprises, les commentaires de nos collègues… Une explication de textes sur beaucoup de sujets techniques et complexes liés à l’épargne et à l’actionnariat-salarié, à la stratégie de l’entreprise, au plan Engage2025, à la veille du premier tour des élections qui désigneront le représentant de l’actionnariat-salarié au Conseil d’Administration d’Orange …
Pourquoi un actionnariat-salarié fort protège-t-il l’avenir des salariés dans le cadre d’un inévitable retrait de l’Etat dans le capital d’Orange ?
Marc Maouche : Nous avons la conviction que l’actionnariat-salarié est un rempart contre des « prédateurs boursiers » qui pourraient s’emparer d’une majorité des actions d’Orange : il faut que les salariés puissent dire si ce projet-là, leur plaît ou pas.
Participant : Oui, mais il faut que leur poids soit fort aussi.
Marc Maouche : En effet. C’est pour cela que notre demande, qui a été reprise à son compte par le ministre des finances récemment, Bruno Lemaire, est que les salariés doivent avoir 10% des actions de leur entreprise pour pouvoir décider par eux-mêmes de leur avenir.
Participant : 10%, c’est suffisant pour faire rempart ?
Marc Maouche : 10%, c’est décisif. Et dans le cas particulier d’Orange et de beaucoup d’entreprises francelaises, il y a des droits de vote double. Donc, si tu possèdes 10%, tu as quasiment 20% en réalité. Et, tout le monde n’étant pas présent en Assemblée Générale, dans le quorum, on peut atteindre 26 ou 27%.
Lors d’une OPA hostile, il faut obtenir une majorité des 3/5ème. Si la proposition n’a pas convaincu les salariés, les potentiels raiders ne peuvent pas rentrer dans le jeu. C’est comme cela que la Société Générale a pu empêcher un raid : grâce aux salariés et à leur actionnariat. C’est donc un sujet stratégique pour nous tous, même si aujourd’hui, Orange est encore protégé par l’Etat.
Participant : Oui, et c’est aussi beaucoup d’argent.
Marc Maouche : En effet, parce qu’il faut investir pour les obtenir.
Participant : Aujourd’hui, l’Etat est l’actionnaire principal.
Marc Maouche : L’actionnaire de référence, mais peut-être plus un jour ou l’autre. A lui tout seul, l’Etat a un pouvoir de blocage au sein des Assemblées Générales, il a 23% entre l’APE (Agence des Participations de l’Etat) (ndlr. Dont la représentante a été invitée à s’exprimer lors de notre dernière AG AASGO 2019), et Bpifrance (Banque Publique d’Investissement). Avec les voix qui comptent double, l’Etat arrive à 40% facilement de l’Assemblée Générale. Or parfois, il faut juste dépasser les 33% pour obtenir le vote d’une résolution.
Participant : Et la stratégie est donc au désengagement ? Enfin, je ne sais pas si on peut parler de stratégie, mais disons, à terme, l’Etat va donc s’effacer dans le capital d’Orange, opérateur historique ou y-aura-t-il toujours un peu d’Etat ?
Marc Maouche : Nous ne le réclamons pas mais cela nous semble être le sens de l’histoire.
Participante : Le jour où l’Etat aura besoin d’argent…
Participant : Mais l’Etat ne doit-il pas toujours un peu « contrôler » les télécoms de son pays ?
Marc Maouche : Il peut réguler, faire voter des Lois pour encadrer ceux qui en ont la charge, mais il n’est pas obligé d’être actionnaire. Par exemple, il dira : vous n’avez pas le droit de vendre à un pays étranger, si je ne suis pas d’accord. C’est ce qu’il y a en Italie, il y a une Golden Chair, il a une action et cela suffit dans certains cas pour bloquer la décision. Mais, dans le cas particulier d’Orange pour la France, il y a le sujet de l’aménagement du territoire, et d’autres sujets, comme l’empLoi des personnels fonctionnaires…
Participant : L’infrastructure, c’est essentiel quand même…
Marc Maouche : Oui, mais il y a plein de pays où c’est complètement privé.
Participant : Est-ce que c’est un domaine régalien ou pas ?
Marc Maouche : Ce n’est plus un domaine régalien puisque la Loi l’a privatisé.
Participant : Oui, mais cela reste une infrastructure essentielle.
Marc Maouche : Voilà ! Mais l’Etat a déjà dit plusieurs fois qu’il avait vocation à sortir. Ça fait vingt ans qu’il l’annonce, il n’a pas non plus accéléré le mouvement, mais…
Participante : Un jour où l’autre…
Marc Maouche : Un jour où l’autre cela va arriver, et ce jour-là, il sera trop tard pour se dire : comment on fait ? Il faut qu’on ait, nous, actionnaires-salariés, le plus de poids possible dans le système.