Il faut que rien ne change pour que tout soit changé…
Ce qui se passe dans le paysage français des télécommunications incite à inverser la phrase célèbre de Giuseppe Tomasi di Lampedusa dans le Guépard.
La tentative de restructuration du secteur a échoué car sans doute la recherche d’une solution franco-française était compliquée, avec des risques d’exécution trop élevés du fait de la multiplicité des acteurs et de l’incertitude sur les décisions du régulateur de la concurrence.
Mais le secteur reste déstabilisé : aucun problème n’est résolu, les 4 acteurs ne pouvant pas tous faire face aux énormes investissements à réaliser pour la généralisation du très haut débit fixe et mobile. Bouygues Télécom est dans une impasse, car sinon pourquoi sa maison mère aurait-elle essayé de vendre pour devenir en échange un actionnaire important d’Orange, n°1 du secteur en France et acteur international solide ?
La concurrence par les prix peut-elle repartir sans devenir suicidaire pour ceux qui auront à la fois un besoin vital d’accroître leur part de marché dans le fixe ou dans le mobile, mais aussi comme impératif de dégager une marge permettant les investissements nécessaires sans s’endetter dangereusement, voire trop coûteusement quand le niveau de leur dette est déjà très élevé (ce qui est le cas pour SFR/Numéricable) ?
Dans ce contexte Orange résiste bien, comme l’ont montré les résultats solides du 1er trimestre 2016. Le dépassement du million d’abonnés à la fibre optique tant en France qu’en Espagne est la preuve de la confiance de la clientèle. Pour autant on doit constater que la croissance vient surtout des nouveaux marchés (Afrique et Moyen Orient) ainsi que des services de pointe –preuve que les investissements d’avenir payent. La marge s’est par contre légèrement détériorée en France, tout comme l’ARPU, notamment pour les services mobiles.
Tout cela montre que la situation ne pourra pas durablement rester inchangée.
Si la consolidation du marché n’est pas réalisable entre les acteurs français, ne sera-t-elle pas alors forcément internationale ? Paradoxalement cela serait peut-être plus simple du point de vue de la concurrence…
Les investisseurs continueront à suivre de près le marché français et ses acteurs. On sait qu’ils aiment peu l’incertitude. Les résultats de l’ORP chez Orange pourraient montrer que l’attachement à l’entreprise ne peut pas compenser totalement une visibilité médiocre sur l’avenir de ce qui est encore le principal marché d’Orange.
De nouveaux épisodes interviendront fatalement pour ce marché…peut-être rapidement.